Les contrats aidés, un passeport pour l’emploi en entreprise

Par WENCESLAS BAUDRILLARD et JEAN-PAUL TRAN THIET

Source : Les Echos 07.09.2017Téléchargement

Pas d’échéance électorale majeure en vue ; des entreprises qui recommencent à embau­cher : il n’en fallait pas plus pour que le gouvernement décide de réduire les emplois aidés.

Ces emplois concernent à la fois le secteur non marchand, collectivités publiques et associations, et le secteur marchand. Entre eux, une commu­nauté d’inspiration : insérer des jeunes écartés de l’emploi. Mais une considéra­ble différence du montant de l’aide. Pour le secteur non marchand, sont prévus l’exonération totale des cotisa­tions et taxes patronales et le rembour­sement jusqu’à 95 % du SMIC. Pour le secteur marchand, la générosité est massivement réduite, avec le seul remboursement de 35 % du SMIC. Au 31 mars 2017, 318.000 jeunes étaient ainsi employés dans le non-marchand et 57.000 dans le marchand.

Malgré cet écart de l’aide, les résultats respectifs mesurés par le ministère du Travail écrasent le secteur non mar­chand : six mois après leur sortie de ces contrats, 36 % des bénéficiaires sont en emploi. En entreprise, dans le même délai, 66 % des sortants sont employés, dont 70 % en CDI. Vu comme passeport pour l’emploi, le contrat aidé échoue dans le secteur non marchand et réussit dans le secteur marchand avec un coût quatre fois moindre.

Pourquoi ce gap ? Parce que les finali­tés des employeurs diffèrent. Dans le non-marchand, l’employeur veut ren­dre un service malgré l’insuffisance de ses ressources. L’Etat, qui a un intérêt majeur dans le traitement social du chômage, prend à sa charge son coût. A l’issue du contrat, l’employeur, tou­jours démuni, laisse partir son employé et embauche un nouveau contrat aidé, presque gratuit. En revanche, l’entre­prise qui embauche en contrat aidé le fait pour un projet de développement mais veut être prudente. Ce soutien lui permet de tester pertinence du projet et capacité du jeune. Si les deux sont vali­dées, le jeune est pérennisé dans son emploi.

Au bout de six mois, 66 % des titulaires de contrats aidés en entreprise sont embauchés.

Il faut les renforcer en exonérant l’employeur des charges salariales.

Alors faut-il sabrer ces contrats aidés ? Les réduire dans le non-mar­chand, sûrement : l’addiction de ces employeurs au travail quasi gratuit est nocive. Mais assistants de vie scolaire pour élèves handicapés, animateurs d’activités périscolaires, aidants pour personnes dépendantes, médiateurs de cité rendent un service réel : qu’advien­drait-il de ceux qu’ils soutiennent ? Et, ne pas l’oublier : ils ne sont plus inscrits à Pôle emploi. La question devient donc celle des priorités, des rythmes et des modalités : quels services préserver, quelle programmation, quelles res­sources ?

Pour les entreprises, doit-on suppri­mer sans rémission un système qui démontre sa capacité à insérer et stabiliser dans l’emploi pour un coût modeste ? Evidemment non. Cela sup­primerait pour les jeunes un vrai passe­port pour l’emploi ^t attenterait à la compétitivité des entreprises. Mais ces contrats aidés peuvent être adaptés aux nouvelles réalités du marché du travail. Dans le sens des initiatives du président de la République, une alternative existe. Les exonérations de charges patronales sont au taquet : pour ces publics, exoné­rons l’entreprise des charges salariales. L’économie pour l’employeur serait d’environ 25 % du salaire brut sans tou­cher à la rémunération nette. Aisément compréhensible, instantanément applicable, cette exonération abonde­rait immédiatement la trésorerie des entreprises. Sans empilage de restric­tions, cette exonération impacterait immédiatement l’emploi des jeunes dont la tranche d’âge bénéficie le moins de la baisse du chômage. Pour les finan­ces publiques, le coût par emploi créé serait inférieur à celui des contrats actuels.

Wenceslas Baudrillard et Jean-Paul Tran Thiet sont membres du groupe « Que faire ? », qui rassemble d’anciens membres de cabinets ministériels de droite, du centre et de gauche, ainsi que des dirigeants d’entreprise.

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